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Les geôles du Paraguay Peu de monde dans les tribunes découvertes du stade.
Je sors la caméra pour filmer du haut des gradins
de béton ; malheur ! Qu’ai-je fait ? Premiers contacts avec les policiers,
d’humbles morveux confondant caméra et pistolet mitrailleur. La même mésaventure m'était arrivée lors d'un
précédent voyage en Bolivie. Trois jeunes soldats se jettent sur moi. L’un
d'eux tente de m’arracher l’appareil qu'il doit prendre pour une arme, tandis
que les deux autres me plaquent le canon de leur fusil sur la poitrine et
l’estomac. Je défends mon bien avec hargne et rage. (…) La Jeep est sale, puante et recouverte d’une toile
caoutchoutée de couleur verte. J’ai peur, c’est vrai, car j’ai lu tant d’horreurs
commises dans ce pays. Je regrette déjà d’être venu, et seul de surcroît. Direction le centre ville, puis arrêt devant une
bâtisse grise tachetée d'ocre. Quelques barbelés en interdisent l'accès. On m'oblige à pénétrer à l’intérieur de celle-ci,
où des policiers en civil genre Gestapo, mais avec des habits démodés et
crasseux semblent ancrés dans le temps. Quelques bureaux de bois sombre et des chaises
bancales stagnent dans un local sinistre. (…) Eternelles questions : provenance, destination,
raison du voyage. Que faisais-je au stade, qui filmais-je, pourquoi, où
vais-je ? Déchiffrage complet et folklorique de mes documents.
(…) Me prennent-ils vraiment pour un perturbateur ou
tentent-ils de justifier leur emploi ? Je connais pourtant fort bien cette deuxième
hypothèse, chez moi, en France... J’essaye de paraître décontracté, ferme et sûr de
moi. On me contraint à descendre au sous-sol, et là, je deviens réellement
inquiet. Quel vaste fossé entre le
fait de lire quelques articles de presse sur l’horreur des prisons
paraguayennes, chez soi, bien au chaud,
et se retrouver soi-même confronté aux murs sordides qui sont
vraisemblablement les témoins sans voix de tortures et d’exécutions, de cris
étouffés, de détresses ignorées. L'humidité suinte des murs gris. Je passe devant ce qui doit être une cellule dans laquelle
se règlent certains comptes. Sur les parois de terre et de cailloux,
d’étranges tâches rouges foncées subsistent. Puis une série de geôles minuscules apparaît. Des
barreaux rouillés zèbrent l'intérieur des cages au sol de terre battue. Point
de fenêtres ; seulement une lampe hideuse accrochée au plafond du couloir
central. J’ai l’impression d’être poussé dans une cité interdite, barbare,
acculé à la suspicion, retranché au fond d’un entonnoir, impuissant. Tout autour de moi, règne une atmosphère saturée. Mes pensées tournent et n’aboutissent pas. Je suis à la fois victime et témoin : victime
emmenée pour rien, même pas pour l’exemple ; témoin du malheur des
autres qui, comme moi, se retrouvent dans ce trou à rat. Quelques femmes sont assises sur des bancs de
bois. Elles sont résignées et abattues, mais elles savent que leur statut
dans ce pays ne leur donne pas droit à un mot, un geste, une faveur ;
pour se sauver, il leur faudra payer d’une façon ou d’une autre, même si on
est venu là, sans inculpation, pour chercher quelqu’un ou quelque chose. (…) Une fille en jupe trop courte sort d’une pièce
avec un filet de sang dégoulinant du nez, le corsage déchiré. Elle ne pleure
pas. Lourd tribut que d’être né ici. Drôle de vie, de pays, d’humanité. (…)
Extrait
de "Cap sur le
Paraguay " De
Pierre Landais La collection Enfants (Pour jeunes lecteurs)
La collection : Junior Aventures (Pour tous lecteurs à
partir de 15 ans… et adultes ! ) Cap sur le Pérou ~ Cap sur Cap sur l’Equateur ~ Cap sur le Brésil ~ Cap sur l’Indonésie Cap sur Cap sur le Guatemala ~ Cap sur le Paraguay Cap sur le Mexique Série : Un aventurier en Amérique
latine
et en Asie |
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Equateur Brésil Bolivie Philippines Guatemala Paraguay Mexique La découverte de ces pays
hors des sentiers battus… Aventures vécues |
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Dans la collection Junior / Senior
Aventures |
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